Chaque année voit l'apparition sur le marché de centaines de nouveaux CD-ROMs. La plus grande part de ces derniers concernent des jeux, certains originaux, d'autres assez discutables, d'autres encore étant des variations plus ou moins réussies de jeux d'arcade, d'aventures, de combat ou de simulation. Doom, Myst, Mortel Combat, Marathon,... se déclinent en plusieurs versions et en plusieurs clones. Il existe des périodiques spécialisés dans leur présentation et leur évaluation, des propos à prendre toutefois avec une certaine réserve, la subjectivité n'étant pas toujours éliminée chez des éditeurs lorsque leur revue dépend pour une très grande part de la publicité et de la documentation fournie par les concepteurs ou distributeurs de CDs; à la limite, on ne peut en dire que du bien, ou alors pas trop de mal. Reconnaissons toutefois que plusieurs revues d'informatique générale n'hésitent pas toutefois à descendre en flammes certains produits; leur objectivité est à épingler.

L'homo occidentalis ,une variété géographique d'homo sapiens sapiens , n'est à l'aise devant les choses qui l'entourent que quand il a effectué un classement de tout ce qu'il trouve. Son esprit cartésien l'oblige inconsciemment à répartir tout ce qu'il voit et perçoit dans des tiroirs sur lesquels il colle une étiquette spécifique reflétant sa propre organisation. Les CDs sont évidemment parmi ces choses à classer, d'autant plus qu'il s'agit de créations de l'homme. Il est clair toutefois que les critères de classification sont loin d'être universels. Nous n'allons pas discutailler sur cet aspect, mais conserver malgré tout ce qui peut paraître évident pour tous.

Une première classification repose sur les types d'ordinateurs(MAC ou PC) et leurs systèmes opérationnels, mais s`en tenir là est vraiment trop simple. En fait, on trouve des CDs:

Dans cette dernière catégorie, un même CD est exécutable sur un MAC ou sur un PC. Dans beaucoup de revues et catalogues divers, les deux derniers groupes sont confondus. Lorsque les informations élémentaires sont connues, voici comment se répartissent les 450 CDs créés et distribués en 1996 :

ceux parus les derniers mois étant très majoritairement MAC/PC. A noter que les logiciels les plus utilisés pour la création de CDs donnent le choix des formats (MAC, PC ou MAC/PC). Dans ces logiciels, le trio MacroMedia, Quicktime et ses extensions 3D et VR, Acrobat et les réalisateurs d'hypertexte font des ravages,.

Quoi qu'il en soit, on s'accorde à reconnaître, objectivement cette fois, que 80 % et plus des CDs connus ne sont guère intéressants, parce que mal conçus, malaisés à l'exécution, ou étant la nième version plus ou moins semblable de ce qui existe déjà. Et dans les 20 % retenus, les jeux se taillent encore une part importante. Nous laisserons aux adeptes ludophiles le soin de faire leur choix, d'exprimer leurs préférences, d'apprécier selon leurs propres critères ce qui, dans un premier temps, les a attirés. Exit donc les jeux...

Dans cette rubrique, notre attention se focalisera essentiellement sur les CDs instructifs (arts, sciences prises au sens large, découvertes, apprentissage des langues,...) parce que ces médias, non basés sur l'adresse et les réflexes, apportent un plus dans nos connaissances, engagent leurs utilisateurs par l'effort, la volonté et la persévérence à étendre l'éventail de leurs capacités intellectuelles, à tenter de satisfaire leur curiosité et, par là-même ,à accroître leurs connaissances (ou de les rafraîchir).

De plus, une certaine longévité de pareils médias est assurée. Un tableau, un oiseau un arbre, cela reste tel quel à travers les âges; Galilée sera toujours Galilée. Ce n'est guère le cas pour les jeux, aussi complexes soient-ils, dès que l'on a épuisé leurs possibilités et atteint le stade du joueur connaissant toutes les astuces et possibilités; bref, pareil CD est parfois très vite épuisé, bon à être relégué dans un tiroir , revendu ou échangé.

Parmi les CDs instructifs seront examinés dans ce bulletin et les suivants, des réalisations appartenant aux catégories suivantes:

Certes, tous les CDs de ces grandes catégories ne pourront être examinés, leur acquisition s'avérant être trop onéreuse... et parfois décevante. Pour chaque CD retenu, nous mentionnerons sa catégorie, son ou ses formats, la langue utilisée, ses exigences logicielles et matérielles. Priorité est accordée à la langue française mais ils sera indiqué si le CD existe pour d'autres langues. Plusieurs CDs consacrés au même sujet, seront comparés.

L'examen des CD commence, dans ce bulletin, par la présentation du `Musée de l'Homme'. Quatre autres CD ont également été étudiés; les textes qui les concernent seont publiés dans un prochain bulletin.

MUSEE DE L'HOMME

Catégorie : Connaissances générales (Musées) - MAC/PC - FR
MAC : 68030 minimum - Système 7.1 ou supérieur - 8 Mo Ram - Moniteur 14 pouces en 256 couleurs - CD-Rom au moins double vitesse recommandé.
PC : 80486 SX-25 minimum - MsDos 5, Windows 3.1 ou supérieur - 8 Mo Ram - Moniteur et CD-ROM comme pour le Mac - Quicktime pour Windows (fourni sur le CD) - Carte son compatible MPC_ associée à des enceintes extérieures.
Editeurs : ODA Laser Edition; Musée national d'Histoire naturelle (Musée de l'Homme), Paris
Conception : Logiciel propriétaire ODA sur Mac.
Présentation : Trois versions d'installation, chacune de 680 Ko, en fonction du moniteur disponible : 256, milliers ou millions de couleurs. Tous les autres fichiers sont cachés, le CD s'étalant sur 635 Mo.

Se basant sur les collections rassemblées dans le musée, trois groupes sont définis : anthropologie, préhistoire et ethnologie et font l'objet chacun d'une section divisée en plusieurs chapitres. Il ne s'agit pas toujours d'un simple exposé sur la discipline, mais plutôt d'un assemblage de figures et d'objets accompagnés de commentaires. Chaque chapitre est lui-même divisé en trois sous-chapitres : présentation, outils, livre.

Anthropologie

Cette section tente de comprendre l'homme à travers l'unité et la diversité de son patrimoine biologique, c'est-à-dire le saisir comme un maillon de la chaîne du vivant. Les affinités avec le monde animal, les singes en particulier, les notions de races, de patrimoine biologique (ADN, gènes) sont abordées succinctement. Il s'agit d'une synthèse générale préliminaire destinée à comprendre les sujets abordés par la suite.

Préhistoire

Toute l'histoire de l'homme est parcourue, depuis l'Australopithecus afarensis (Lucy), soit il y a env. 3,5 millons d'années, jusqu'à l'Homo sapiens sapiens, l'homme moderne. Les espèces les plus importantes des genres Australopithecus et Homo sont présentées, montrant leur évolution via des textes et des images, abordant leurs techniques et leur art quand ces éléments sont connus. La section s'achève par des considérations sur le `Début de l'agriculture et de l'élevage' et sur le `Début de la métallurgie'. Ce panorama est assez complet et très instructif; les nombreuses illustrations appuyent un texte, récit vocal ou texte défilant sur l'écran, où les principales données sont exposées clairement. Manifestement, l'approche didactique n'a pas été négligée.

Les auteurs n'ont pas présenté un arbre phylogénétique reliant les espèces entre elles sur une échelle du temps, depuis la différenciation entre les singes et les hominidés, indiquant les embranchements supposés. Il est vrai que les incetitudes et les discordances subsistent, sans cesse remises en question à la suite de nouvelles découvertes; autant ne pas s'engager dans un débat qui risque fort d'être provisoire (voir Science, février et avril 1994). Dans le chapitre relatif au Paléolithique supérieur, partie `Art pariétal', on ne mentionne que les fresques de Lascaux; rien n'est dit sur celles d'Altamira et de Chauvet (Ardèche). D'autre part, on sait que des `cousins' de Lucy, des ossements trouvés au Kenya il y a une vingtaine d'années viennent seulement d'êtres scientifiquement identifiés et datés. Il s'agirait d'Antrhopithecus anamensis , env. 1 million d`années plus vieux que Lucy.

Pour plus d'information, consulter Les premiers hommes - Collection `Les berceaux de l'humanité' - Editions Bordas.

Ethnologie

Il s'agit de la présentation de plus de 100 peuples et tribus, classés dans une quarantaine de régions avec ces dernières réunies par continent. Vu le nombre retenu, l'information reste forcément assez fragmentaire; elle reste un peu statique malgré un accompagnement de séquences video animées. Pour ce qui concerne l'Afrique, il manque apparemment une structure reliant les différents peuples. Le nombre de chercheurs du Musée de l'Homme ayant collaboré à cette section est assez important mais l'impression reste que le contenu apparait très lié à l'histoire de la colonisation française en Afrique. Il y a tant d'oublis, d'absence de synthèse qu'il parait opportun de rectifier le tir.

Sans entrer dans trop de détails, les peuples d'Afrique se répartissent en quelques groupes principaux, caractérisés par leur aspect physique et liés par leur langage:

A part les aborigènes, dont les survivants restent confinés dans leurs territoires, tous les autres peuples se sont mis en mouvement, finissant par peupler, après plusieurs siècles, la totalité du continent (Carte page 30).
Les bantous furent certainement les plus entreprenants. Peuples d'agriculteurs, ils ont envahi une grande partie du continent, depuis l'Afrique de l'Ouest jusqu'au Cap. Se différenciant en tribus, on y retrouve les peuls, les hutus, les kikuyus, les swahilis, les zoulous. Les langues bantoues, regroupant plusieurs centaines de dialectes, ont même été adoptées par d'autres ethnies, notamment par les nilotiques dont les tutsis font partie. La population noire des Amériques est d'origine bantoue.
Les nilotiques, outre au Sudan (Nubie), se retrouvent dans nord-est du Zaïre et au Kenya-Tanzanie notamment (Masais).
Les hamito-sémitiques occupent actuellement l'Afrique du Nord, le Sahara dans sa plus grande part, le Sudan en partie et bien entendu l'Ethiope et la Somalie. Ce groupe déborde de l'Afrique et s'étend au Moyen-Orient (Palestine, Isaraël). Citons dans ce groupe: berbères, touaregs, fellahas (juifs éthiopiens) égyptiens, etc.

Pareille répartition des peuples d'Afrique, avec leurs affinités évidentes, ne se retrouve pas sur le CD. Mais deci delà, on a isolé l'une et l'autre tribu, au gré de la documentation disponible au Musée de l'Homme. Parmi les bantous, seuls les zoulous sont mentionnés ! Les nilotiques, les hamitos-sémitiques, en tant que groupes importants, les hottentots, tout cela reste ignoré. Certes, au delà des langages se superposent des traits physiques évidents et nettement différenciés, mais il a semblé préférable de ne pas aborder cette connotation raciste. Les chercheurs français sont mal à l'aise dès qu'ils doivent s'intéresser à l'Afrique orientale et à l'Afrique du Sud. Aborder les peuples autrement que par une série d'images superposées et simplement décrites, mais relever leurs affinités, leurs liens, leurs origines me parait être une démarche plus plausible.

Rien n'est dit sur l'écriture. Et pourtant, les contacts entre égyptiens et les sémites existaient au moins depuis 1500 ans BC, du temps de Ramsès II. La langue égyptienne (ne parlons pas des hiéroglyphes qui ne sont qu'une forme d'écriture) a été fortement marquée par l'influence sémitique prise au sens large. Pour tout le continent, en dehors de l'Egypte, c'est uniquement en Ethiopie que l'on y découvre l'écriture présente il y a plus de 2000 ans. L'Ethiopie n'a jamais été une colonie, à part durant le court épisode italien quelques années avant 1940.


Rassembler tout ce qui concerne l'homme sur un seul CD est une réelle gageure, à vrai dire une tâche impossible. Des choix s'imposent donc pour les contraintes que le média exige: pas plus de 640 Mo disponibles. Le panorama donné est, dans son ensemble, très valable malgré quelques faiblesses. Toute personne sensibilisée par la question sera certainement incitée à poursuivre ses investigations pour les compléter, ou mieux les comprendre. Dans cette intention, une liste d'ouvrages à consulter serait indiquée; elle manque malheureusement. Pas de critiques négatives sans apport constructif: voici une référence extrêment intéressante. Il s'agit de la collection Les origines de l'Homme publiée par Time-Life International en 21 volumes richement illustrés et documentés. Cette oeuvre magistale a été publiée, en français, une première fois dans les années `70 mais fait l'objet de rééditions occasionnelles. Dans cette collection, voici quelques volumes recommandés : Les débuts de la vie , Le chainon manquant, Les premiers hommes, Les premiers cultivateurs, Le miracle de l'éctriture. Autre référence: Les premiers hommes - Collection `Les berceaux de l'humanité - Editions Bordas.

Il a été dit précédemment que chaque chapitre d'une section présente trois directions d'investigation : présentation, objets, livre. La présentation consiste en un récit vocal, mais ce n'est qu'un résumé du choix `livre' par lequel l'accès est donné à toute la documentation du chapitre. Il y a manifestement la duplication d'une même information et la présentation de celle-ci, sous forme vocale, avec affichage de plusieurs séquences video animées, occupe une très grande place sur le CD. Certes, dans un but attractif (et pour une justification du prix de vente), on apporte un volet multimédia complet, mais cela se fait au détriment de l'information qui pourrait être plus complète et/ou plus fouillée, sans un apport sonore ou vidéo assez superflu.

Georges Troupin


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Dernière modification de cette page : 30 octobre 1997